27/09/2010

Hats Off to Barry

As those kind - and patient - enough to follow this blog on a regular basis must know by now, I'm an enthusiastic defender and promoter of the short story, which I regard as the most demanding (and thus most rewarding) form of fiction, especially mystery fiction. Stanley Ellin, Henry Slesar, Robert Arthur, Edward D. Hoch or John Collier rank high in my personal pantheon, and Donald Westlake's or Lawrence Block's shorter work I always found to be more interesting than their longer efforts. 

Before going further I must admit to a slight bias here as the author I'm about to discuss is a personal friend and has been for years, even though we never actually met - only Internet may make such things possible. Barry Ergang is one of the highly interesting fellows I've encountered on the highly interesting GAdetection board; we come from opposite corners of the mystery field, being of a decidedly traditionalist bent while he is more of a hardboiled guy (nobody's perfect) but our common liking for the Man Who Explained Miracles and our devotion to short stories made sure we'd get along very well, if not always seeing eye to eye. As many GAders, Barry doesn't content himself with reading mystery fiction: he writes some, too. And I think he does quite well.

Years ago I was one of the privileged ones he asked to review his then-latest effort, a piece called "The Play of Light of Shadow". To review a friend's work is always a difficult experience, as you have to balance criticism and sensitivity in a more careful way than you do when asked to judge the work of someone you don't know. Regarding "The Play of Light and Shadow", however, I didn't need to worry about that, since it was just excellent. Barry successfully blended there his two favorite themes, the tough and the impossible. I don't want to spoil anything and I'm not that good at summaries anyway, so let's say that it's about an impossible crime solved by a hardboiled dick going by the name of Darnell and that it's an absolute winner, both in term of plotting (with an elegant and - to me, at least - original solution) and good characterization, especially of the lead character. (I have spent the last half-decade or so asking Barry for a sequel as I think Darnell has a lot of potential - and I'm still waiting) And then there is the writing - lean, sparse, precise. 

His latest collection, "A Flash of Fear" displays Barry's pointe sèche at its best. It is a collection of six flash stories - or short-shorts if you're not into Internet neologisms. As I said above, the regular short story is the most demanding of all forms, and the short-short is the most perillous of its variations - telling, as opposed to outlining, a compelling story in a few lines requires virtues that not every writer possesses. Barry does, however, and if you think I'm just pouring friendly praise on an old comrade, you might like to know he's a past winner of the highly coveted Derringer Award, in - guess what? - the "Flash Fiction" category

On AFF's evidence it's easy to see why. Each one of the six vignettes has enough material for a more verbose writer to make a novel or at least a novella out of it; Barry for one packs it all in a few lines, complete with endings as sardonic as anything Jack Ritchie ever deviced. I mention Ritchie here as, I think, he would have approved of such sarcastic gems as "The Merchant of Varnish" with its devilish pun, "Moaning Lisa" or "Mother's Day Present" - he would, too, have liked the darker "No Such Thing" where Barry shows he can handle serious issues and drive his point home without hammering it (a poor pun as you'll realize when you read the story, but I couldn't help it) Ritchie was after all a master of both the cynical twister and the compassionate noir. 

The best piece, however, reminds one of Hammett in its extremely stripped-down, yet evocative, prose. Barry says it was intended to be "an experiment in the objective style" and for fear of seeming overly complimetary I'll just say it is very effective. "Ambition" may not be the cleverest story in the collection, but it summarizes what, in my view, makes Barry a writer to follow, that is, his ability to suggest a setting, invoke a character and a situation in a unique, convincing way with a few words and just basic English. Quite a feat and, in these times, worthy of encouragement. I strongly advice you to encourage Barry by reading his works.

Further reading:

All of Barry's works previously discussed, as well as a few others, can be found (and, for some, bought) as Smashwords e-books (click here)


26/09/2010

Inglourious Basterds (Quentin Tarantino, 2009)

Inglourious Basterds est, si mes comptes sont bons, le sixième long-métrage de Quentin Tarantino, et c'est le premier dont je puisse dire qu'il m'a vraiment plu. Ce qui ne veut pas dire que je suis soudainement converti au tarantinisme - les réserves que m'inspirent le réalisateur et son approche du cinéma subsistent; elles sont même, paradoxalement, renforcées.

Comme le film est assez récent et a rencontré un franc succès - le plus gros de toute la carrière de Tarantino, avec plus de 300 millions de dollars au compteur - je ne pense pas avoir besoin d'en faire un résumé très approfondi. Sauf à avoir passé les deux dernières années sur une île déserte, ou dans un abri anti-atomique dépourvu de toute réception radio ou télévisuelle et de toute connexion internet, vous savez probablement que l'action du film se déroule pendant la seconde guerre mondiale, et suit en parallèle les exploits d'une bande de "salopards" spécialisés dans le nazicide sanglant, emmenés par le sémillant Aldo Raine (Brad Pitt) et la vengeance de Shoshanna Dreyfus (Mélanie Laurent) contre les nazis responsables de la mort de toute sa famille. Un tel point de départ, et Tarantino aux manettes, laissait supposer que Inglourious Basterds ne serait pas un film de guerre académique. Supposition qui s'avère on ne peut plus fondée, et participe du succès du film. Tarantino applique en effet ses méthodes habituelles - citation/récupération/plagiat d'oeuvres célèbres ou complètement obscures, clins d'oeil au spectateur, violence décomplexée, dialogues-fleuves - à un genre souvent pétrifié qu'il renouvelle avec vigueur. Il n'hésite pas non plus à s'asseoir sur la vérité historique - et le fin du Reich telle qu'il la voit est certainement plus... galvanisante (au sens propre comme figuré) que le triste "dernier tango à Berlin" de la réalité. Vous vouliez voir Hitler se faire réduire en charpie à la mitraillette? Tarantino fait de ce rêve une réalité. On saluera également le coup de poker qui consiste à faire porter le film sur les épaules d'un acteur peu connu, incarnant un personnage résolument ignoble. Car c'est bel et bien ce Landa, interprété avec génie par l'Autrichien Christoph Waltz, qui s'avère le personnage le plus intéressant du film, celui qui reste le plus vif dans le souvenir. Voilà belle lurette que l'on n'avait pas vu une telle figure de salaud, et l'adage de Hitchcock - "meilleur est le méchant, meilleur est le film" - se vérifie donc une fois de plus.

Mais nous sommes chez Tarantino, ce qui veut dire que ce qui fait la force du film est également ce qui pose problème. Le dépassement de la vérité historique - qui ne me pose, en soi, aucun problème: c'est l'une des prérogatives de la fiction - s'accompagne également d'une oblitération du contexte. La seconde guerre mondiale n'est ici qu'une toile de fond, et les nazis sont des méchants comme les autres, parfois ridicules mais pas particulièrement violents ni impitoyables, puisque tout le monde ou presque dans le film est violent et impitoyable. Tarantino s'est fait plaisir en tournant une histoire pleine de sang, de bruit et de fureur dont le cadre se trouve être la France occupée parce que c'est exotique, et les méchants des nazis parce qu'ils sont tellement cinégéniques - bref, il a fait du Tarantino: un cinéma référentiel et au final parfaitement abstrait. Que le brouet prenne ici remarquablement bien, n'empêche pas de se poser des questions sur la recette et sur les intentions du chef.

Tarantino m'a toujours paru la démonstration par l'absurde de la théorie des auteurs, et de son inutilité fondamentale. Si par "auteur" on entend un réalisateur au style immédiatement reconnaissable, aux thèmes récurrents et personnels et dont la "vision" se retrouve de film en film, alors Tarantino est indubitablement un auteur. Mais ce style, ces thèmes, cette vision sont au service de rien. Il ne s'agit pas de reprocher à Tarantino de n'avoir "rien à dire" - ce qui est l'un des reproches les plus stupides que l'on puisse faire à un artiste. La filmo de Tarantino donne cependant plutôt l'impression d'une suite d'exercices de style que d'une oeuvre véritable; l'auteur s'amuse avec le petit train cher à Orson Welles, mais on reste au niveau de l'amusement: tout ceci n'est qu'un jeu. Et parfois, Tarantino est le seul à s'amuser comme dans le déplorable "Boulevard de la Mort" qui pousse la méthode à son extrême masturbatoire. Rien d'étonnant, donc, à ce que Inglourious Basterds soit vide de toute perspective morale; c'est le cas de tous les films de Tarantino et on ne voit d'ailleurs pas pourquoi il en serait besoin, puisque tout cela est un jeu. N'empêche que la cruauté universelle de ce monde où la violence est seule loi, a quelque chose de glaçant, surtout ici, et débouche sur des résultats assez paradoxaux, les "bons" étant presque plus effrayants que les "méchants". On peut évidemment y voir une volonté de "subversion" de la part de Tarantino, de dynamitage des conventions et des idées cinématographiquement reçues. On peut. Mais on peut également - ce n'est pas exclusif - y voir une indifférence souveraine aux enjeux, à la limite de l'irresponsabilité. Tout cela n'est qu'un jeu, après tout.

23/09/2010

La fille du bois maudit (The Trail of the Lonesome Pine, Henry Hathaway, 1936)

Sorti en 1936, The Trail of the Lonesome Pine est l'un des tout premiers longs-métrages en technicolor trichrome, et le premier tourné en extérieurs. C'est également l'un des plus beaux films de Henry Hathaway, à coup sûr l'un des metteurs en scène les plus sous-estimés de l'âge d'or hollywoodien.

L'histoire explore un thème récurrent du cinéma américain, à savoir la rencontre entre la nature et la civilisation - et ce qui en résulte. La nature est ici incarnée par June Tolliver (la délicieuse Sylvia Sydney) et sa famille de hillbillies coupés du monde et plongés depuis des temps immémoriaux dans une guerre sanglante contre leurs voisins, les Falin; la civilisation vient bousculer tout cela sous la forme d'une voie ferrée et de son séduisant ingénieur, Jack Hale (Fred
McMurray) Si les deux cultures semblent raisonnablement s'accorder dans un premier temps, les choses se gâtent très vite comme la civilisation commence d'exercer son influence "délétère" sur le clan Tolliver, June surtout qui, bien que fiancée à son cousin Dave (Henry Fonda) lui préfère de plus en plus Jack Hale, et se met à rêver d'émancipation. Mais c'est l'ingérence de Hale dans le conflit entre les Tolliver et les Falin qui précipitera la tragédie...

Le film est également une méditation sur la violence, son absurdité et son coût humain exorbitant. June naît littéralement au milieu du champ de bataille (admirable prologue) et la haine que se vouent les deux familles, à force d'exclure tout autre sentiment, les maintient dans
la misère, voire une certaine forme d'animalité: tout ce joli monde est analphabète, signe les contrats d'une simple croix et ne reconnaît un chèque qu'au logo de la compagnie ferroviaire qui y figure. Dans un tel contexte, il n'y a guère de place pour la beauté (les papillons sur lesquels on s'exerce au lancer de couteaux) ou l'intelligence: la scène qui résume le mieux le propos du film est celle de la mort du petit Buddie Tolliver - qui rêve de devenir ingénieur et a commencé d'apprendre à lire - victime d'une bombe posée par le plus dégénéré des fils Falin. Même l'amour maternel (bouleversante Beulah Bondi) est impuissant à mettre fin au carnage. L'opposition entre nature et civilisation, je l'ai dit, est un thème cher aux cinéma américain, mais elle ne tourne pas ici à l'avantage de la première, quand bien même le film reconnaît l'impossibilité de la dompter entièrement(June, malgré son bref passage en ville, retourne "à l'état sauvage"après la mort de son frère)

Hathaway joue remarquablement du contraste entre ces ténèbres humaines et la beauté luxuriante du décor, admirablement filmé et photographié. Ceux qui pensent que le Technicolor est nécessairement artificiel et criard (ce qui n'est pas forcément une mauvaise chose, mais
passons...) gagneraient à regarder ce film aux couleurs magnifiques et surtout naturelles, au point qu'il faut parfois se pincer pour se souvenir que le film date de 1936, et que le procédé n'en était encore qu'à ses balbutiements. L'interprétation est d'un très bon niveau, mais c'est le tout jeuneot Henry Fonda qui se distingue par son jeu très moderne, tout en non-dits et en retenue. On sent déjà pointer la grande star qu'il deviendra quatre ans plus tard.

Archives du blog